Je suis né en 1987, je suis artiste, poète (ou écrivant), créateur de la structure éditoriale Pli et de la revue éponyme. Diplômé d’un DNSEP en 2010, je poursuis depuis un travail quotidien de création, de réflexion (dessin, photographie, écriture.s) et d’édition, sans pour autant faire de l’édition une profession.
Je mène une recherche pluridisciplinaire. Cependant, le dessin, la photographie et l’écriture restent des pratiques quotidiennes depuis une quinzaine d’années, une approche nourrissant ou complétant l’autre ; sorte de dialogue logique, où d’un matériau à l’autre, d’un outil à l’autre, on fabrique des correspondances, des échappées, des retraits comme des refus, des chemins de lecture, on les révèle. L’écriture est parfois un choix, une combinaison, entre formes et moyens ; il y a l’écriture stricte, au sens où il s’agit de textes ; poésie ou essais (Extrait des nasses, Parloar, Écrase-mémoire), fragments et articles en revues/journaux (« Aux territoires imprenables », « Misères de la technique », « Forme juste sans moyens », etc). Puis parallèlement, une approche plastique de l’écriture où j’expérimente avec ses matérialités, les processus et les contextes (Actes-Textes, Destituants, Métagraphies) jusqu’à retrouver ou retourner au dessin, sous une forme d’écriture sans mots (Masses-Temps, Chronographies), considérant ces réalisations comme une sorte de documentation matérielle de la pensée, documents ou travaux que j’expose et dispose au grès des invitations. Cet ensemble constitue pour moi une pratique entière et fragmentaire, dont le fond, scriptural et politique, pourrait être le liant. Ce liant ne pouvant être que lié à une forme de vie que je souhaite tenir comme une vérité, qui n’est pas une pratique-passion comme on a souvent l’habitude de l’entendre, et de plus en plus hélas.
Concernant l’édition, j’ai toujours perçu le livre comme un lieu, un lieu qui se passe de mains en mains, un lieu fait de sédiments, où une somme de propositions hétérogènes, propositions-mondes, peuvent se répondre, faire sens et dont la portée, dans le temps, reste imprévisible. Un lieu comme un projectile. J’ai créé la structure éditoriale et associative Pli en 2012 ; en 2013 sortait le premier numéro de la revue éponyme. Je terminais depuis peu mes études, je n’avais pas d’espace où travailler, et je constatais également un écart grandissant entre les contextes critiques, sociales, politiques, de vie, et le milieu littéraire ou plus largement, artistique. Le premier numéro de la revue est né de cette ambition : faire lien entre les générations, jeunes auteur.es et auteur.es confirmé.es, anonymes, amis, artistes, poètes et théoriciens, en leur offrant carte blanche fond et forme, une revue sans thématique imposée, donc. Et le pari était pour moi de démontrer sans le revendiquer qu’un fil commun allait se dessiner par le fait. Ce qui a toujours été le cas, depuis 14 numéros et plus de 200 auteur.es publié.es. Cette aventure de la revue, ou de l’œuvre commune, reste une prolongation d’attentions et d’intentions littéraires et artistiques, c’est aussi une sorte de ponctuation au cours d’une année de recherches que j’ai toujours voulu vivante et disons, prolongeant le geste artistique. Plusieurs livres sont sortis ces 10 dernières années, en dehors de la revue. J’ai également tenu à diffuser ces ouvrages, ce qui m’a permis de conserver un lien direct, un échange réel avec les lecteurs.trices et les auteur.es. Il en va de même pour le façonnage des couvertures, toujours réalisées à la main, par divers procédés, un espace d’intervention, de création faisant de chaque livre un exemplaire unique. Puis il y a également les livres uniques, qui sont presque des points de jonctions, mi-chemin entre l’édition et la création, toujours ancrés à la vie et détachés de toutes sorte d’impératifs. La plupart de ces livres uniques que j’ai fabriqués jusqu’à présent étaient destinés à des amis, parfois des lecteurs qui soutenaient la revue, ou étaient parfois ponctuation dans potlatch, matériaux d’échanges et de mémoire, d’une mémoire immédiate et adressée.
En septembre de cette même année (2023) j’inaugure un nouvel espace, avec la parution du livre Club bizarre, de Nathalie Quintane et Stéphane Bérard, toujours aux éditions Pli, mais cette fois, en lien avec un diffuseur et un distributeur. D’autres ouvrages suivront sûrement, toujours dans la poursuite des liens sensibles et effectifs, parmi des gestes artistiques, historiques, politiques. Toujours avec la même lenteur et la même attention, ne pas devenir éditeur, donc.
Je suis né en 1983, je vis et travaille à Saint-Nazaire.
Diplômé de l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts du Mans. Je présente mes créations depuis 2009 dans des expositions personnelles ou collectives, en France ou à l’étranger (Canada, Etats-Unis, Belgique). Je pratique l’assemblage, l’installation, le montage de formes et d’espaces et la création d’objets.
En « archéo-anthropologue des formes perdues », j’interroge des structures architecturales, des sites utopiques et des objets complexes (polyèdres, géodes, …), pour développer un art de constructeur, en prise avec la mémoire et l’histoire, susceptible de révéler la « survivance des fantômes ».
Mon enquête plastique autant qu’existentielle sur le destin d’œuvres et de lieux de la fin de la modernité – comme Spiral Jetty, de Robert Smithson, ou la ville utopique de Drop City – témoigne de ma prise en charge, par la pensée et la pratique, d’une époque nouvelle où le modernisme lui-même semble relever de l’archéologie.
Mes constructions matérielles, sont bien des concrétions de pensée, des lieux de mémoire et l’affirmation toujours renouvelée de l’action constructive comme contribution humaine.
Justin Delareux :
J’ai réalisé mon premier livre unique (et pauvre) à 15 ans : il s’agissait d’une anthologie de poésie surréaliste ayant pour trame commune le Temps, relié avec une épingle à nourrice… J’ai repris la fabrication de livres pauvres lorsque j’étais étudiant aux beaux-arts, c’était devenu pour moi un moyen de regrouper textes, dessin, collages, estampes, déjà, un moyen de lier des mondes. Puis, il y a eu la revue Pli. Mais je n’ai pas cessé pour autant la création, ponctuelle, de livres uniques, comme je le précise plus haut. Je ne suis pas un lecteur de roman, ou alors pas encore. C’est par le biais des livres pauvres que j’ai entendu parler du travail de Michel Butor, lorsque j’étais étudiant. De fil en aiguille, les années passent et j’apprends qu’il existe un lieu où l’on accueil des écrivains, des binômes artistes-écrivains (l’Archipel Butor, donc). L’an dernier, j’ai raté l’appel à candidature, j’étais en plein déménagement, le temps manquait. Puis il faut dire aussi, que je suis assez peu à la recherche de résidences de création, dans la mesure où j’ai deux petits garçons, et qu’il est parfois difficile de concilier la vie et ce genre de déplacement sur de longues périodes. Cette année, j’ai eu la possibilité de candidater, et candidater pour une résidence à l’Archipel Butor m’a semblé être une sorte de logique pleine de sens, une poursuite étendue de ce qui me travaille depuis pas mal d’années maintenant. Le fait que la résidence soit proposée à des binômes m’a d’autant plus motivé que nous avons candidaté avec l’ami et artiste Alexis Judic, avec qui j’ai déjà travaillé par le passé, et avec qui j’ai d’ailleurs d’autres projets en cours (nous discutons la forme livre depuis quelques temps). Bref, la possibilité de dégager du temps, un espace et un financement pour réaliser quelque chose qui nous tenait à cœur et en parfaite adéquation avec le lieu, m’a semblé être une possibilité heureuse.
Alexis Judic :
C’est Justin qui m’a parlé de la résidence, de sa particularité, et de la possibilité de candidater en binôme. Nous nous voyons régulièrement avec Justin et depuis longtemps nous avions envisagé de travailler la question du livre.
Oui, nous avons déjà réalisé plusieurs expositions ensemble, ainsi qu’une lithographie, sous un pseudonyme commun, à savoir « Groupe Rembrunir ». Il s’agissait à la fois de mettre nos noms respectifs de côté au profit d’installations ou de divers déploiements, mais également de faire sens à travers des propositions hétérogènes, sûrement liées par des préoccupations communes ; l’histoire des arts, de l’architecture, de la peinture, le monde dans lequel nous vivons, dans lequel avons grandi et grandissons encore, les minimalistes, la techno et quelques visées critiques également, souvent.
Entre 2015 et 2016 nous étions accueillis au DomaineM, un lieu de résidence dans l’Allier, porté par l’historien de l’art Michel Cegarra.
Justin Delareux :
La résidence sera fragmentée en trois ou quatre temps. Nous avons convenu de plusieurs dates où nous pourrions chacun nous libérer, ce qui n’est pas toujours évident. Il devrait y avoir un premier temps de rencontre en septembre, avec le lieu et les personnes qui s’occupent des structures amies, ce sera également un temps possible où nous pourrions présenter nos travaux et recherches respectives, ainsi que notre projet commun pour cette résidence. Il y aura aussi un temps d’atelier, sûrement avec des étudiants des Beaux-arts, toujours autour du livre, de l’édition, des écritures, des images, puis un temps de création et de restitution, qui, nous l’espérons, nous permettra de présenter nos livres impossibles. Alexis Judic et moi vivons dans la même ville (Saint-Nazaire) ce qui nous permettra de travailler ce projet sur un temps plus étendu.
Alexis Judic :
Nous avons plusieurs pistes sur la table, une idée de fond serait celle de livres impossibles. Nous imaginions des livres en béton, en bois, fragiles, à lecture unique. Nous souhaiterions surtout travailler la matérialité, au sens entier du terme, des livres sculptures. Mais nous ne souhaitons pas trop en dire, car il nous faut encore expérimenter avec les matériaux envisagés, et quelques outils dont nous ne disposons pas encore.
Justin Delareux :
Pour ma part, une exposition collective (H2O) en octobre prochain à la galerie des Franciscains (Saint-Nazaire), et le début d’un long travail de dessin (Masses-Temps, Chronographies), dont une partie pourrait être présentée au salon du dessin contemporain à Paris, en mars 2024. Ce projet va me prendre beaucoup de temps. J’imagine une exposition de ces dessins à l’automne 2024 à Rennes, si tout va bien, à Nantes et Saint-Nazaire également. Je pense aussi profiter du commencement de cette résidence à l’Archipel Butor pour reprendre la fabrication de livres uniques, sur une année également, d’autant plus que je collecte des matériaux depuis plusieurs mois, il serait temps. J’envisage aussi l’écriture d’un long texte pour un travail vidéo qu’Alexis Judic a débuté, je n’en dit pas plus. Concernant les publications, en tant qu’auteur, je viens de publier l’extrait d’un texte en cours d’écriture dans le dernier numéro de la revue Teste, véhicule poétique, et un texte théorique sera publié dans la revue INTER (Québec) ce mois de septembre 2023, ce sera une sorte d’étape, car je travaille à la rédaction de plusieurs textes en ce moment même, et cela devrait durer dans les mois qui viennent.
Avec les éditions Pli, il y a la sortie, en septembre toujours, de Club bizarre, (Nathalie Quintane et Stéphane Bérard), le livre sera disponible dans toutes les bonnes librairies indépendantes de France, de Suisse et de Belgique. Nous faisons une première présentation du livre le 11 octobre 2023 à Paris (librairie L’Atelier), puis je serai présent au salon des revues, à Paris toujours, la même semaine. Puis je me garde la possibilité de réaliser une édition suite à notre résidence à l’Archipel Butor, mais pour l’instant (nous sommes en août) il est trop tôt pour en dire plus.
Alexis Judic :
Je suis actuellement en préparation d’un projet de film de 24 heures qui utilise en partie l’intelligence artificielle et dans le même temps, je vais réaliser une formation dans le travail du bois.